Gabriel Attal, à la fin du défilé militaire, le 14 juillet 2024, à Paris. LAURENCE GEAI /MYOP POUR « LE MONDE »
D’autres auraient été meurtris par la fin annoncée d’une aventure politique aussi éphémère. Mais, ce dimanche 7 juillet, lorsqu’il sort de l’Elysée après avoir échangé avec Emmanuel Macron sur les résultats désastreux pour le camp présidentiel, lors des élections législatives, Gabriel Attal ne pense pas à son départ programmé de Matignon, près de six mois seulement après son arrivée. Non. Le chef du gouvernement savoure déjà son triomphe personnel. « J’ai sauvé la République ! », se vante-t-il, immodeste, en croisant près des grilles du palais un fidèle du chef de l’Etat, désarçonné par tant de morgue.
Quelques minutes plus tard, le président de la République, irrité par celui qui fut un temps surnommé le « bébé Macron », ne daignera pas le regarder s’émanciper franchement de sa tutelle face aux caméras de télévision. « Cette dissolution, je ne l’ai pas choisie, mais j’ai choisi de ne pas la subir », affirme Gabriel Attal, depuis le perron de Matignon, rappelant n’avoir pas été associé à la décision du chef de l’Etat, incomprise et blâmée par les macronistes, de dissoudre l’Assemblée nationale, le 9 juin. Se félicitant d’avoir repoussé, après une campagne intense, «_ les extrêmes »_, à savoir le Rassemblement national et La France insoumise, le premier ministre annonce le soir même qu’il remet sa démission, refusée par Emmanuel Macron.
Un parfum de revanche plane Rue de Varenne. Mardi 16 juillet, le locataire de l’Elysée doit accepter la démission du gouvernement, et donc de son premier ministre, qui resteront toutefois un certain temps en place et disposeront d’un pouvoir restreint pour gérer les « affaires courantes ». Mais sans attendre, celui qui fut, à 34 ans, le plus jeune premier ministre de l’histoire de la Ve République, a déjà pris en main son destin, loin de ce président que l’on dit irrémédiablement affaibli. Le député des Hauts-de-Seine a maintenant les yeux rivés vers l’Assemblée nationale. Elu, le 13 juillet, président du groupe des députés Renaissance, rebaptisé « Ensemble pour la République », le voici prêt, selon ses mots, à « tout réinventer, tout reconstruire », suggérant de facto que tout a été détruit. « Gabriel Attal suit le pouvoir », constate Vincent Martigny, professeur de science politique à l’université de Nice et à l’Ecole polytechnique.
Le « sens du devoir »
Profitant de ses derniers instants Rue de Varenne, le premier ministre a fait monter à la hâte, le 5 juillet, au premier étage de Matignon, le bureau de son père adoré, mort en 2015. Le meuble qui a suivi Gabriel Attal dans tous ses ministères a été placé à côté du bureau de Léon Blum, sur lequel le premier ministre travaillait jusqu’ici. Aucun carton n’est encore empaqueté. Gabriel Attal est conscient qu’il pourrait s’éterniser quelques semaines à Matignon afin de gérer un fonctionnement minimal de l’Etat. En particulier pour s’assurer de la bonne marche des Jeux olympiques de Paris, du 26 juillet au 11 août, le temps que le nom d’un remplaçant n’émerge.
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